Se former à l’IA n’est pas une option mais une nécessité : tribune de Matthias De Bièvre


Selon France Travail, 85 000 postes dans le secteur numérique étaient non pourvus en 2023, en France. Ce chiffre est alarmant : il est nécessaire que les employeurs anticipent et s’adaptent rapidement à l’ère de l’IA, sous peine de voir leur compétitivité sérieusement remise en question.

Former et recruter les bonnes compétences : une nécessité pour tous les employeurs

Chaque entreprise, quels que soient sa taille et son secteur, sera bientôt confrontée aux défis posés par l’IA. Que ce soit pour automatiser des processus, optimiser la prise de décision ou proposer de nouveaux services, l’IA devient un facteur clé de succès. Cependant, pour en tirer parti, les entreprises doivent non seulement recruter les talents adéquats, mais aussi investir dans la formation continue de leurs équipes. Cela implique de s’assurer que leurs collaborateurs acquièrent les compétences techniques nécessaires pour comprendre, utiliser et développer des solutions d’IA.

Selon un rapport de McKinsey, seulement 37 % des entreprises en Europe estiment disposer des compétences internes nécessaires pour utiliser les technologies d’IA. Ce déficit de talents représente un obstacle majeur à l’adoption de ces technologies. En conséquence, les départements des ressources humaines se retrouvent en première ligne pour identifier les compétences nécessaires et les développer rapidement. Pour réussir cette transition, les entreprises doivent absolument intégrer l’IA dans leurs stratégies de gestion des talents et veiller à ce que leurs employés soient formés aux métiers de demain.

Identifier les besoins en compétences et trouver les formations adaptées

L’un des défis majeurs pour les entreprises réside dans l’identification précise des compétences dont elles auront besoin à l’avenir. Comment anticiper les transformations que l’IA va imposer à chaque métier ? Comment savoir quelles compétences seront critiques dans 3, 5 ou 10 ans ? Ces questions doivent être au cœur des stratégies des employeurs.

Les entreprises doivent commencer par cartographier leurs besoins à court et moyen terme, en tenant compte des spécificités de leur secteur et des technologies qu’elles comptent déployer. Cela implique de collaborer étroitement avec les centres de formation, les universités et les startups spécialisées en IA pour co-construire des cursus adaptés à leurs réalités. Mais ce n’est pas tout : il est essentiel de pouvoir matcher ces besoins avec les formations existantes. Pour cela, les entreprises doivent pouvoir accéder à des outils performants et des données fiables sur les offres de formation et le marché de l’emploi.

Un exemple à suivre est celui de la Grande École du Numérique (GEN), qui, en partenariat avec des plateformes dédiées, propose une analyse fine des besoins en compétences numériques sur le marché français. En combinant des données d’organismes comme France Travail, CPF ou l’Onisep avec des outils de skills analytics, la GEN, via GEN_SCAN, permet d’identifier les besoins en compétences des entreprises et de les comparer avec l’offre des formations. Les organismes de formations peuvent ainsi construire des cursus en adéquation avec les besoins des  employeurs ; les individus, grâce à un moteur de recherche, peuvent trouver des formations numériques par famille de métiers, par métiers, par régions, etc. Ce modèle de collaboration entre l’entreprise et les organismes de formation est essentiel pour garantir que les compétences acquises soient en adéquation avec les réalités du marché.

La souveraineté économique passe par une formation autonome et souveraine

Cependant, il ne suffit pas de former : il faut aussi garantir que les formations soient orientées vers les besoins des entreprises françaises et européennes. Aujourd’hui, une grande partie des compétences en IA est dominée par des technologies américaines. Microsoft, Google et d’autres géants de la tech investissent massivement dans la formation de talents… pour leurs propres écosystèmes. Ces formations, bien que efficaces, enferment nos entreprises dans une dépendance technologique envers des solutions propriétaires qui ne répondent pas toujours aux besoins locaux.

Il s’agit ici d’une question de souveraineté économique : si nous ne formons pas nos talents pour répondre aux défis spécifiques de nos entreprises, nous contribuons au succès de géants étrangers au détriment de notre propre compétitivité. Nos entreprises risquent de devenir les simples utilisateurs de technologies conçues ailleurs, au lieu d’en être les concepteurs. Le développement de formations souveraines, en partenariat avec des acteurs locaux, est essentiel pour reprendre le contrôle de notre avenir numérique.

Le modèle proposé par la Grande École du Numérique, qui valorise l’autonomie des formations locales et l’alignement sur les besoins des entreprises, montre qu’il est possible de former nos talents en France. Il est temps pour les entreprises de s’approprier ces solutions et d’investir dans des programmes de formation qui répondent à leurs besoins, plutôt que de se tourner exclusivement vers des solutions étrangères.

Agir maintenant pour rester compétitif demain

L’IA n’est pas une option pour les entreprises, c’est une nécessité. Mais sans une stratégie de formation adaptée, elles risquent de voir leur compétitivité décliner face à des acteurs mieux préparés. Selon l’OCDE, d’ici 2030, 32 % des emplois seront profondément transformés par l’automatisation et l’IA. Seules les entreprises qui sauront anticiper cette transformation, en formant et en recrutant les talents adéquats, tireront leur épingle du jeu.

En conclusion, l’avenir des entreprises françaises dépend de leur capacité à former leurs collaborateurs aux compétences IA nécessaires pour les défis de demain. Il est urgent d’agir, non seulement pour combler le déficit actuel de talents, mais aussi pour garantir que la France conserve sa souveraineté technologique et économique. Reprendre la main sur la formation en IA, c’est investir dans l’avenir de nos entreprises et de notre économie.

À propos de Matthias De Bièvre

Matthias De Bièvre est le Fondateur et Président de Visions, intermédiaire de données personnelles des espaces de données. Il s’engage activement dans la mise en place d’une véritable gouvernance républicaine de la donnée et dans la création d’une intelligence artificielle humaniste. Il est également à l’initiative de Prometheus-X, qu’il a co-fondé avec le soutien de la Commission Européenne, afin de faciliter la création d’espaces de données gérant à la fois des données personnelles et non personnelles. Avec des centaines de partenaires, il trace la voie vers une infrastructure souveraine et éthique des données personnelles en Europe. Récemment, Matthias De Bièvre a commencé à proposer de nouvelles utilisations des données et des technologies via des vidéos, sous le pseudonyme @OurDataPower, pour les mettre au service du plus grand nombre.



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