Faciliter le transfert pédagogique via 14 actions clés !

Faciliter le transfert pédagogique via 14 actions clés !


La question (ou problématique) du “transfert des acquis” en formation n’est pas nouvelle du tout ! Elle a même passionné des chercheurs, aussi bien en psychologie, qu’en sciences de l’éducation et même des spécialistes du management, de la gestion et de l’ergonomie. Dés les années 1980 par exemple, deux auteurs, Baldwin et Ford, estimaient que sur 100 milliards de dollars (de l’époque) investis en formation aux USA , 10% seulement des acquis faisaient l’objet d’un “transfert” ! Bonne nouvelle : avec le récent renouveau de “l’apprentissage par le faire“, on dispose d’une palette de modalités facilitant (en principe) ce fameux transfert : AFEST/formation en situation de travail, tutorat, mentorat, co-développement, pairagogie, formation-action, apprentissage par projet, etc. C’est bien mais sera-ce suffisant ? 

Plus on rapproche la formation des situations de travail ou plus on intègre des possibilités d’apprentissage dans le travail, plus la probabilité du transfert est élevée ! Ceci étant-dit, la qualité du transfert ne dépend pas uniquement de la pertinence de la modalité pédagogique utilisée. Une série de conditions et d’actions, constituant une sorte de check-list des professionnels de la formation, pourraient optimiser  le transfert !

Nous retenons dans cet article 14 actions prioritaires, classées en 4 grandes catégories. Ces actions ne sont bien sûr pas exhaustives.

  1. Sept actions relevant des formateurs,
  2. Trois conditions et actions relevant du management des apprenants,
  3. Deux qui relèvent des environnements d’apprentissages,
  4. Enfin deux actions relevant des apprenants eux-mêmes !

1. Comment les formateurs peuvent faciliter le transfert ?

Les conditions que nous rappelons ici ne sont pas “tirées” de notre chapeau mais fortement inspirées des recherches et études de psychologues du développement, d’universitaires et auteurs, tels que John Dewey, Lev Vygotsky, Jerome Bruner, David Perkins, Peter Senge. Leurs travaux ont fait l’objet de nombreuses publications et d’ouvrages. Nous en faisons régulièrement l’écho dans notre série d’articles du blog de C-Campus présentant les concepts pédagogiques et auxquels nous renvoyons nos lecteurs qui souhaitent approfondir !

Evidemment les formateurs (au sens large du terme,  y compris les responsables pédagogiques, les concepteurs, etc.) se taillent “la part du lion” dans les leviers d’actions facilitant le transfert des acquis par les apprenants. Ils en disposent en effet d’au moins 7.

  • 1- Des objectifs clairs : les objectifs d’apprentissage doivent être très clairement exprimés. Les apprenants doivent rapidement percevoir pourquoi et comment ils vont pouvoir appliquer les connaissances, méthodes, techniques, etc. apprises en formation.

Exemple : On utilisera bien entendu des verbes d’action inspirés, par ex. de la taxonomie de Bloom, pour qualifier les objectifs d’apprentissage et on proposera comme exercice aux apprenants, à la fin de la journée de formation, de rajouter des compléments d’objets directs et indirects. Les COD et COI sont indispensables en effet à la compréhension d’une action. Il ne s’agit pas bien sûr de jouer au professeur de français avec ses apprenants mais de leur faire produire des idées sur la transformation des objectifs pédagogiques en actions concrètes, c’est-à-dire en objectifs d’application sur le terrain !

  • 2- Une formation contextualisée : les situations d’apprentissage traitées en formation doivent être les plus proches possibles des situations professionnelles que vivent (encore mieux : ont déjà vécu) les apprenants.

Prenons l’exemple des formations à l’anglais : les enseignements linguistiques “généraux” n’ont guère de sens dans la formation professionnelle. L’enseignant doit cerner le contexte et les usages des connaissances en anglais, dont a besoin l’apprenant. Ce n’est pas la même chose s’il s’agit d’anglais écrit de type lecture et réponse à des e-mails ou de conversation courante avec des clients dans le cadre de relations commerciales !

  • 3- Des cas réalistes : les travaux réalisés durant la formation, notamment les simulations et exercices pratiques, doivent être réalistes par rapport au quotidien des apprenants.

Par exemple, cela ne sert à rien de s’entrainer sur les règles d’or de la négociation commerciale, si la seule marge de négociation sur laquelle peut jouer l’apprenant commercial est le délai de livraison… L’inverse est vrai aussi : si l’on se contente de faire travailler les apprenants sur des cas “simples ou non stimulants”, ils se désintéressent rapidement de la formation commerciale, car elle ne leur apporte rien !

  • 4- Une variété d’exemples travaillés en formation : plus les exemples sont variés (sans excès) plus l’apprenant arrive à les relier à ses connaissances antérieures et à en faire un “apprentissage” qu’il va pouvoir utiliser ! De même, le formateur usant de métaphores, anecdotes, comparaisons, similitudes etc. permet à ses apprenants de créer des “connexions” dans leur cerveau, entre ce qu’ils savaient déjà et ce qu’ils découvrent ! Ainsi on peut mieux leur faire comprendre et appliquer des “concepts”.

L’apprenant par exemple reliera le concept “d’empathie” à travers des jeux de rôles aussi différents qu’un entretien managérial, ou une négociation commerciale, ou encore une demande de réclamation auprès d’un service client. 

  • 5- Une collaboration entre apprenants : les pédagogies interactives et constructives, par exemple les travaux de groupes avec des échanges entre participants, facilitent aussi le transfert. Les retours d’expériences, les cas concrets des collègues, leurs anecdotes, leur vécus, parfois chargés d’émotions, nous ouvrent de nouvelles perspectives et nous aident à voir comment nous pourrions pratiquer à notre tour !

Important : la part émotionnelle et sociale est aussi importante dans le transfert des acquis, que la part des apports et contenus dans une formation. Raison pour laquelle les formateurs aguerris n’ont pas peur de laisser les émotions et discussions prendre une part de la journée de formation. Les bons formateurs veillent même à ne pas prendre “trop de place” dans la formation et ils évitent de se mettre en position centrale vis à vis du groupe !

  • 6- Des évaluations formatives durant les longs parcours de formation (durée supérieure à plusieurs dizaines d’heures) : ces évaluations vont aider l’apprenant à prendre conscience de ses forces et de ses axes de progrès (ou de points de vigilance) qu’il pourra ensuite travailler à sont retour de formation.

Astuce :  le formateur soignera les critères et les modalités d’évaluation, afin qu’elles soient guidantes et éclairantes pour ses apprenants !

  • 7- Des instructions de transfert explicites : le formateur ne se contente pas de demander à ses apprenants d’appliquer les acquis : a minima il leur propose de réaliser un “plan de transfert et de suivi”.

Mieux :  il peut leur proposer, comme nous le faisons par exemple. dans nos formations de formateurs, référents AFEST ou tuteurs, de consacrer un temps de réflexivité à la fin de la formation. Ce temps est guidé grâce la méthode de questionnement RIEC

La technique réflexive RIEC© est un des outils de La Méthode AFEST © de C-Campus. Si vous souhaitez savoir comment cette méthode peut vous aider à déployer des formations avec un meilleur niveau de transfert des acquis, contactez-nous pour en disctuter : formation@c-campus.fr

2. Le rôle déterminant des managers !

Les managers en tant que “maîtres de l’organisation du travail” ont évidemment un rôle crucial dans le transfert des acquis de leurs apprenants, au cours et surtout au terme d’une formation. Un manager qui s’en désintéresse, ne joue non seulement pas son rôle mais en plus il envoie un signal négatif à son collaborateur, qui pourrait interpréter cela comme un “désintérêt” de son responsable hiérarchique pour sa formation. Voyons plutôt 3 exemples de bonnes pratiques et actions du côté des managers !

  • 1- Préparation du transfert : le transfert des acquis de la formation par l’apprenant peut nécessiter par exemple un aménagement par le manager, de ses situations de travail, voire de son poste.

Exemple : le N+1 peut déléguer une nouvelle mission (un nouveau chantier, un travail différent…) permettant au collaborateur de pratiquer immédiatement ce qu’il a appris en formation.

  • 2- Rétroaction constructive de type feed-back ou accompagnement à la réflexivité : des appréciations et échanges constructifs de la part du manager au sujet de la pratique des acquis, vont encourager le collaborateur à persévérer et l’aider à s’améliorer.

Exemple : La réflexivité (amont ou aval, avec respectivement les méthodes RIEC © ou FAST © de C-Campus)  encourage quant à elle la réflexion de l’apprenant sur l’application des connaissances. Elle développe aussi sa capacité à tirer des enseignements de sa pratique, ce qui consolide le transfert.

  • 3- Partage en équipe : encourager l’apprenant à partager ce qu’il vient d’apprendre en formation à l’ensemble de l’équipe peut évidemment améliorer le transfert.

Astuce : le manager peut ainsi demander à son collaborateur-apprenant de partager à la réunion d’équipe périodique ce qu’il a appris et compris durant sa formation, les difficultés qu’il a rencontrées ainsi que son plan d’action pour les traiter. Cela aide l’apprenant à réfléchir aux conditions concrètes du transfert et cela inspire aussi le reste de l’équipe…

3. L’importance de l’environnement d’apprentissage…

Les commanditaires de l’action de formation (responsable formation, fonction L&D, etc.) peuvent quant à eux créer dans l’environnement d’apprentissage de l’apprenant, des conditions favorables au transfert des acquis. Bien entendu, une culture d’apprentissage permanent au sein de l’organisation est souvent indispensable. Mais nous avons repéré deux autres actions qui nous semblent intéressantes :

  • 1- Pédagogies immersives : l’intégration de technologies telles que la VR – Virtual Reality peut créer des environnements d’apprentissage immersifs, favorisant le futur transfert.

Evidence : on pense aux casques de réalité virtuelle et autres simulateurs sophistiqués et aussi à tout ce qui émerge du côté de l’intelligence artificielle (plus accessible en termes de coûts, apparemment), ce qui permet par exemple de simuler des actes métiers !

  • 2- Contextes variés et riches : plus l’environnement de travail de l’apprenant lui permet de vivre des situations variées et riches d’enseignements, plus l’apprenant va devoir réfléchir et s’adapter. Inversement, les tâches répétitives et routinières en formation ne sont guère favorables à un transfert solide.

Astuce : graduer la difficulté des mises en situation de l’apprenant. Par exemple, au début on lui propose d’appliquer ses acquis dans des activités faciles et dans un contexte familier puis on lui suggère des activités plus “challengeantes” dans un contexte différent et enfin des situations délicates ou complexes, avec plusieurs paramètres à prendre en compte.

4. Et l’apprenant dans tout ça ?

L’apprenant lui-même peut s’astreindre à deux actions simples, qui vont l’aider à “transférer” ses acquis de la formation !

  • 1- Prise de conscience : de nombreux chercheurs dans les sciences de l’éducation ont remarqué que les apprenants pleinement conscients du nécessaire transfert des acquis en formation, ont bien plus de chances de le réaliser. Cela a l’air d’un “enfonçage de porte ouverte” mais la prise de conscience, cela se travaille dès avant la formation ! On appelle ça “l’engagement” et nous avons déjà abordé ce  concept pédagogique. Illustrations : lire nos articles sur l’engagement en formation et l’importance de l’auto-évaluation en formation !

Pour être très concret : il s’agit de demander à l’apprenant, à l’occasion par exemple d’un entretien ou en fin de stage de formation, de définir lui-même son objectif de mise en oeuvre, avec la règle des “3 C”. L’apprenant devra préciser les différents Contextes possibles de la mise en oeuvre, les Comportements qu’il compte adopter et les divers Critères qui lui feront dire qu’il sera en maîtrise. 

  • 2- Révisions : les bons réflexes de l’instruction d’antan, comme “réviser” régulièrement ses connaissances, cela a du bon aussi dans l’univers professionnel ! La révision régulière de ses connaissances renforce également le transfert, en aidant à consolider ce qu’on appelle la “mémoire à long terme” (versus “la courbe de l’oubli”, classique en formation sans transfert).

Astuce : l’apprenant n’est pas obligé de réviser de “manière scolaire” en relisant ses cours. Il peut le faire de manière plus active, par exemple via la réalisation d’une “veille”, en devenant à son tour “accompagnateur” ou encore au travers d’une “confrontation” de connaissances avec ses pairs ! Autre méthode assez ludique : la boite ou méthode de répétition de Leitner

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