Audrey Danna, d’une VAE CAP PE à une VAE d’éducatrice de jeunes enfants

Audrey Danna


Avec les souvenirs des heures passées à l’école aux côtés de sa maman ATSEM et de tout temps un intérêt marqué pour la petite enfance et ses mystères, Audrey aurait pu avoir une vocation précoce toute tracée, un parcours professionnel sans embuches. Mais la vie est parfois plus tortueuse. Audrey quitte l’école tôt, avant d’avoir son bac et enchaine les petits boulots sans formation spécifique. Obligée de changer de voie après un accident de travail, elle se souvient de son intérêt pour la petite enfance et propose ses services de garde d’enfant à domicile. S’en suivent trois riches années, à répondre aux besoins des parents et accompagner des fratries avec lesquelles elle garde encore certains liens. « Ces familles m’ont accordé leur confiance, ce qui m’a permis de gagner en assurance personnelle et de conforter mon envie de travailler auprès d’enfants », assure Audrey.  

Des rencontres enrichissantes et formatrices

Lorsqu’elle quitte Lille pour le sud de la France, Audrey expérimente l’accueil collectif : elle saisit l’opportunité de pouvoir faire un remplacement dans une crèche privée, qui l’embauche par dérogation de la PMI, malgré qu’elle n’ait aucun diplôme. Une chance pour la jeune femme qui, accueillie par une équipe bienveillante, va apprendre directement sur le terrain les principes de base de l’accueil collectif de la petite enfance. C’est dans cette crèche qu’elle fera deux rencontres déterminantes pour la suite de sa carrière professionnelle : une auxiliaire de puériculture « très à l’écoute » qui prend le temps de lui transmettre tout son savoir. « Je pense que ça a été très bénéfique pour intégrer la structure et l’envie de bien travailler, d’avoir les bons gestes », reconnait Audrey. Et une éducatrice de jeunes enfants qui lui donnera l’envie d’aller toujours plus loin, d’en apprendre davantage. Cette dernière deviendra une amie et un soutien indéfectible tout au long de son parcours. 

Une VAE CAP petite enfance très accessible 

Audrey est embauchée en CDI, sous réserve de passer prochainement son CAP Petite Enfance (à l’époque) en candidat libre par VAE. Elle se lance quelques mois plus tard, une fois arrivée à Marseille. Elle a alors 31 ans. Ses expériences de garde à domicile et de crèche collective lui ont permis d’acquérir les compétences nécessaires qu’il lui suffira de prendre le temps de valoriser, à l’écrit puis à l’oral, pour valider les modules de son CAP, sans difficultés. « Ce diplôme était largement à ma portée, reconnait-elle. Du point de vue des compétences demandées, cela restait basique et accessible. Au niveau CAP, la VAE peut être facile pour quelqu’un qui a des facultés à écrire et monter un dossier (…) Tout dépend si le jury est suffisamment à l’écoute et pose les bonnes questions ». Avec un peu de recul, elle estime que cette VAE est « un bon parcours » professionnalisant mais qu’il serait intéressant d’exiger des candidats « des lettres de recommandation et davantage de compétences théoriques », pour obtenir des professionnels plus solides et mieux formés. 

Un coup de cœur pour le métier d’EJE 

Sitôt diplômée, Audrey se voit confier un relais de direction dans la micro-crèche dans laquelle elle exerce à l’époque, preuve de la confiance que lui témoigne déjà sa référente technique. Aguerrie à la gestion d’entreprise grâce à ses toutes premières expériences professionnelles dans le commerce, elle relève le défi et assure petit à petit les missions habituellement dévolues à un poste d’éducatrice de jeunes enfants… et trouve cela passionnant ! « J’ai adoré réfléchir et mettre en place le projet pédagogique de la crèche, découvrir l’envers du décor, être libre de monter des projets pour l’équipe, les parents et les enfants… ». Au-delà des projets, elle comprend qu’elle aime aller plus loin, se questionner pour comprendre, creuser et analyser les situations pour accompagner au mieux. Elle décide alors de se relancer dans un parcours de VAE pour obtenir son diplôme d’EJE, parce que financièrement, elle ne peut pas retourner se former à l’IRTS. Mais là, la marche est un peu plus haute à gravir.

Une VAE EJE en deux temps 

Au fil de l’année 2020, elle prend le temps de se questionner sur le référentiel métier, d’analyser son parcours, ses expériences professionnelles, de choisir les situations à exposer pour constituer son livret. Opiniâtre, elle travaille seule, avec le soutien de son amie EJE et ancienne collègue, qui la conseille et la relit. Elle se présente une première fois devant le jury mais ne valide qu’un module sur les quatre. « Ça n’a pas fonctionné parce que je n’étais pas prête. Je n’avais pas encore assez de vécu », reconnait Audrey. Qu’à cela ne tienne, elle ne se décourage pas et retravaille son livret 2. Les quelques mois supplémentaires viennent enrichir son expérience et changer son regard sur sa pratique professionnelle. « J’ai choisi de reprendre mon livret, de parler d’autre situations vécues », explique-t-elle. Lors du second oral, sa persévérance est perçue de manière très positive par le jury. Estimant qu’elle avait gagné en confiance dans sa pratique. « Lorsque j’ai présenté mon deuxième oral, je me sentais vraiment EJE, bien plus qu’avant », admet Audrey. Marquée par son parcours peu scolaire, elle est d’autant plus fière d’obtenir ce second diplôme.  

La difficulté d’endosser une nouvelle posture 

Une fois diplômée, elle reconnait qu’il n’a pas été tout de suite aisé de « se sentir EJE », d’endosser cette posture au sein de l’équipe, alors que toutes étaient, à la base, titulaires d’un CAP petite enfance. « C’est également parfois compliqué dans le regard des autres. Pourquoi moi, devrais-je me considérer autrement – avec des connaissances supérieures, être en capacité de mener des projets et d’être écoutée – et pas elles ? Mais j’ai des collègues qui m’ont beaucoup soutenue et m’ont directement considérée comme « l’EJE », ça n’a pas été un problème ». Pour Audrey, c’est une question de posture et de cohésion dans la manière de présenter les choses en incluant les professionnelles quelles qu’elles soient : « Sans faire de distinction en fonction de leur formation : on travaille toutes ensemble dans le même but et chacune apporte ses connaissances et ses compétences »

Contribuer à la formation des jeunes professionnelles 

Audrey accepte ensuite un poste de direction d’une micro-crèche, puis deux, la moitié du temps auprès des enfants et l’autre dans son bureau. Elle constate des manquements dans la formation des stagiaires et des professionnels qu’elle embauche, qu’il y a parfois des vides entre la formation théorique reçue et la mise en pratique sur le terrain. « Il y a un monde entre la théorie et la pratique, note-t-elle. Et puis on est tellement en manque de professionnels qu’on ouvre la porte à tout le monde, on finit par manquer d’exigence avec des recrutements faits dans l’urgence… ». Elle décide de quitter la crèche pour devenir EJE libérale et se consacrer à la formation professionnelle pour partager son expérience. Elle propose un soutien pédagogique aux CAP AEPE, par le biais du GRETA. Elle se réjouit : « J’endosse là une nouvelle posture de formatrice, et je comprends que c’est l’une de celles qui me plait le plus ». Forte de ses différentes expériences professionnelles elle propose également son accompagnement aux équipes des crèches pour l’analyse de leur pratique. Audrey l’explique : « Pour avoir vécu des séances d’analyse de la pratique en crèche, avec un psychologue qui vous écoute mais n’apporte aucune solution, je me suis dit que si je pouvais aiguiller les professionnels à trouver par eux même la solution et leur donner quelques pistes de réflexion ce serait intéressant… ». 

Si elle vient de revenir à la direction d’un multi accueil, pour mieux concilier sa vie personnelle et sa vie professionnelle, Audrey reste convaincue de la nécessité d’avancer, d’évoluer, de se nourrir de projets pour être épanouie dans son métier. Et le secteur de la petite enfance est riche de possibilités. « Si l’on est motivée et que l’on croit en soi, il ne faut pas hésiter ! », s’exclame-t-elle, enthousiaste. Audrey se réjouit d’avoir commencé « par le bas de l’échelle » pour évoluer et mieux comprendre les métiers de la petite enfance. Et comme cette insatiable a toujours des projets en tête, elle espère pouvoir un jour accompagner les jeunes parents…





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